dilluns, 18 de juny del 2007

la grande morte épisode 6



De son côté, les premiers soirs du coup de foudre, fier de son amour, Jean avait amené Laetitia au Mézy. Sa deuxième maison. Il exhibait son bonheur à ses collègues pêcheurs, tous déjà maqués avec une gonzelle et un mioche. Il l’avait traînée jusqu’au bar, tout fier : « Ca y est je suis deux ».
Il voulait qu’elle aime ses amis. Que ses amis l’aiment avec elle. Qu’ils aiment le tout qu’il formait avec elle. Qu’elle aime le tout qu’il formait avec eux. Il voulait tout, et ce fut rien.
Laetitia s’était sentie mal. Ces gars là, ces marins, ils se parlaient en code, entre hommes avec leurs yeux bouffis, leurs sous-entendus criards, « a mai ! », « canta lo », « aqueste còp », curieux langage, se connaissaient trop. Ils puaient le tabac fort et le Pastis. Elle avait paniqué, elle aussi avait mis son masque : un loup d’intellectuelle. Il avait fallu aller se coucher.

Il renonça un temps à ses amitiés viriles, accusa ses collègues d’intolérable intolérance. Puis il était revenu. Certains, les plus proches, ne lui parlaient plus. Il fallait qu’il comprenne qu’il n’était pas bien avec elle ! Ils le connaissaient eux et le savaient mieux que lui : ils n’étaient pas assortis.

Le silence, c’était la leçon des pêcheurs.

Les autres marins, de simples collègues, lui charraient encore. De dorades, de saules et de télines . Mais jamais d’elle. Elle et son prénom : sujets tabous.
La perte des meilleurs amis, il avait vécu cela comme un décès.
Depuis, lui et elle menaient des soirées parallèles.
Ils sortaient à part.
Ils l’avaient voulu sans le vouloir.
Tous les deux.
Sans se le dire.